On oublie souvent qu'il faut relire Barthes sans relâche. Comment ça ? Vous n'êtes pas en train de relire Barthes ? Peut-être faut-il déjà — simplement — le lire ?
Monthly Archives: October 2013

#40
Le haïku a cette propriété quelque peu fantasmagorique, que l'on s'imagine toujours pouvoir en faire soi-même facilement.
Roland Barthes, L'empire des signes
Flammarion, coll. Champs, 1970

#39
Je suis l’auteur : regardez mon visage ou mon profil ; voici à quoi devront ressembler toutes ces figures redoublées qui vont circuler sous mon nom ; celles qui s’en éloignent ne vaudront rien ; et c’est à leur degré de ressemblance que vous pourrez juger de la valeur des autres. Je suis le nom, la loi, l’âme, le secret, la balance de tous ces doubles.
Michel Foucault, préface de l’Histoire de la Folie à l'âge classique
Gallimard, Collection « Tel », 1972

#38
Tous ces grands arbres, immergés jusqu’à la naissance des branches, simulent dans l’obscurité nos chênes et nos hêtres ; on dirait un pays inondé de nos climats, s’il n’y avait cette chaleur lourde, ces excès de senteurs, ces excès de bruissements partout, cette pléthore de sève et de vie. Le ciel s’est de nouveau rempli de nuées d’orage et l’air redevient accablant.
Pierre Loti, Angkor
Éditions Magellan, 1912

#37
Ellen Galt Martin, si elle avait été l'héroïne d'un roman sudiste, aurait eu le teint de pêche des jeunes filles élevées sous serre et délicates. Ses longs cheveux lisses sont vraisemblablement d'un noir bleuté. Ils accrochent des reflets d'aile de corbeau lorsqu'elle se balance dans son rocking-chair, sous la véranda de la grande villa blanche de la rue Julia, dans le beau quartier des Trois-Maisons, où elle n'entend pas chanter les oiseaux du jardin.
En 1849, l'unique amour dans la vie de William Walker meurt du choléra.
Patrick Deville, Pura vida, vie et mort de William Walker
Seuil, 2004

#36
La nuit vient quand nous nous remettons en route. Cris de hiboux, cris de bêtes de proie ; concert infini de toutes sortes d'insectes à musique, qui délirent d'ivresse nocturne dans les inextricables verdures.
Pierre Loti, Angkor
Éditions Magellan, 1912
J'aime cette fausse anagramme du mot silence... qui le fait tomber dans la licence...

#34
[...] et déjà tout ce que nous avons bâti à Phnom Penh a pris un air de vieillesse, sous la brûlure du soleil ; les belles rues droites que nous y avons tracées, et où personne ne passe, sont verdies par les herbes ; on croirait l'une de ces colonies anciennes, dont le charme est fait de désuétude et de silence...
Pierre Loti, Angkor
Éditions Magellan, 1912
Quand il pleut aussi joliment, c'est de l'art ; on dit qu'il pleut des cordes vocales...
#32
Marguerite Duras interroge sur le site de l'INA, un petit garçon de 7 ans sur l'avenir. Réponses surprenantes...
J'ai longtemps eu une certaine aversion pour Marguerite Duras, mais, je ne sais pas pourquoi, plus le temps passe, plus je me sens attiré par cette dame que j'ai connu à la fin de sa vie sans avoir d'autres images d'elle que l'image d'une vieille dame tassée. Elle symbolise pour moi une époque révolue, l'époque de ses entretiens avec Mitterrand... une époque que j'aime encore.